Lorsque j’interviens pour une conférence sur l’innovation ou la créativité, il y a une question qui revient de plus en plus souvent : on me demande si les robots et les intelligence artificielles sont des sources de progrès d’un point de vue créatif, si « l’automatisation » et le transfert de compétences à des robots ou des lignes de code sont compatibles avec la créativité. Voici donc quelques réflexions et une poignée de références pour éclairer ce sujet passionnant et complexe.
Ce n’est pas le robot qui est créatif, c’est l’humain dégagé de ce qui lui pollue les neurones.
Dans un article publié par Forbes, l’entrepreneuse numérique Falon Fatemi, fondatrice de Node.io, s’intéresse à l’impact de l’intelligence artificielle sur la créativité. Selon elle, l’intelligence artificielle ne va absolument pas la tuer mais va au contraire créer un environnement plus propice à l’étincelle créative en nous libérant des tâches rébarbatives et automatisables, purement techniques, administratives etc. Autrement dit selon elle : IA = créa, mais de façon indirecte. Ce n’est pas le robot qui est créatif, c’est l’humain dégagé de ce qui lui pollue les neurones. C’est un point de vue.
Les robots ne sont-ils vraiment que des copieurs ?
Pourtant, Watson, le programme d'intelligence artificielle développé par IBM, a déjà réussi à produire la bande-annonce d’un film, inventé des recettes de cuisine et créé des publicités interactives pour de grandes marques. Doit-on alors parler de créativité pour tout cela ? D’autres IA se sont déjà montrées capables de composer de la musique classique, de peindre un tableau figuratif ou abstrait ou même d’ écrire un roman (on aime ou on aime pas l’écriture par un robot, ça c’est un autre sujet !)
La question n’est donc pas selon moi est-ce qu’une IA peut être créative, mais plutôt est-ce qu’une IA peut être créative et produire des choses pertinentes, intéressantes, stimulantes, vraiment « novatrices » ? Lorsqu’on parle de produits normés, l’IA peut intervenir en effet. Des ingénieurs français ont d’ailleurs développé un logiciel capable d’anticiper la réussite (ou l’échec) d’un roman en fonction de ce qui le compose. Pourquoi ? Car certaines littératures sont des produits standardisés (notamment dans la romance), comme le sont certaines musiques (on pense au tube de l’année…). A ce compte là, une IA peut en effet « être créative », c’est-à-dire produire du nouveau, mais du nouveau standard, attendu, sans surprise. Comme le démontre ces musiques créées par une IA étonnante : elle sort des albums chez Warner Music (20 déjà !), les lance sur Spotify, mais si on en croit les critiques "le résultat n'est pas très diversifié".
Une IA peut « être créative », c’est-à-dire produire du nouveau, mais du nouveau standard, attendu.
Car son champ d’action est pour l’instant limité à la reproduction de « patterns » connus et documentés par des ingénieurs. Demain sera-t-elle capable de sortir de ces canevas pour véritablement proposer de l’inédit ? Les ingénieurs de IBM en sont convaincus. On demande à voir. Le débat est en tout cas ouvert
Une seule certitude : l'IA va (partiellement) nous remplacer
Ce qui est certain, c’est que - si on en croit un rapport récent de McKinsey - l'IA devrait remplacer entre 75 et 375 millions d'emplois d'ici 2030, soit entre 3 et 14% de la main-d'œuvre mondiale). Ce qui fera alors demain la différence entre le robot et l’humain ? Selon Fatemi, le premier sera une machine à penser, quand le second aura l’initiative de la création.
Qu’en pensez vous ? Est-ce que vous croyez que l’IA menace la créativité? On en parle quand vous voulez, lors d’une conférence ou autour d’un café :)